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“Le château de son père, la gloire des amers”

Ce carnet de voyage fait partie d'un périple plus vaste. Reprenez-le depuis le début ! C'est ici : « Contes et déconvenues du Chaco (et d'ailleurs) ».
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Le cœur un peu gros, nous avons pris congé de Hans, et nous filons derechef sur la rectiligne Transchaco, après avoir récupéré notre auto – ça ira plus vite qu'en charrette pour enlever les 450 km d'ici à Asunción !
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Cependant que l'horizon ne se plisse pas d'un pouce à l'extrémité de la cravate amidonnée que nous repassons en flèche, des constellations de carandays épinglent nos revers, ourlet de verdure signalant les confins du chaco seco.
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Et quelques heures plus tard, c'est un paysage {et un temps} subtropicaux qui nous accueillent aux portes d'Asunción, matérialisées par le pont à péage qui permet l'un des deux uniques franchissements du ségrégateur Río Paraguay.
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Au faîte de l'ouvrage d'art, nous embrassons du regard la Baie d'Asunción, dominée par les modiques gratte-ciels de la capitale paraguayenne. Puis nous accostons à la rive orientale – ¡adiós chaco querido!
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Asunción. L'agglomération est à l'échelle du pays : avec son gros million et demi d'habitants, cette cité périphérique du Cône Sud fait pâle figure à côté de Buenos Aires ou des métropoles brésiliennes.
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Et ce groupe de guarania1 n'ameute pas autant de touristes sur la fraîche émoulue Plaza de la Democracia2 qu'une milonga à Buenos Aires !

1 Guarania = musique folklorique typique du Paraguay, inventée dans les années 20 ; la harpe utilisée traditionnellement dans ces formations compte entre 36 et 38 cordes diatoniques, et ne comporte pas de pédale ; elle est ainsi plus maniable qu'une harpe classique.

2 La Démocratie est en effet une ressuscitée de fraîche date au Paraguay, ayant été rétablie en 1989 après le renversement du Général Stroessner, dictateur de sinistre mémoire ayant régné 35 ans sur le Paraguay, ultime représentant du “Terrorisme militaire” dans le Cône Sud.

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Qu'importe ! Asunción possède ce charme indicible des villes de province, une architecture surannée encore épargnée par les promoteurs immobiliers... « ¡Chipas! ¡Chipas! » ; il vend quoi, l'équilibriste ?
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Trop tard ! Pris au dépourvu, nous avons laissé filer le panier fleurant bon le pain chaud. C'est ça, de badauder l'objectif en l'air, à photographier de vieilles façades du siècle dernier !
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L'estomac contrarié, nous nous dirigeons vers le fleuve, traversant le vieux quartier du Port, empruntant la galerie ombragée de la Recova, devenu un repaire d'impitoyables attrape-touristes.
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Flûte, nous sommes tombés dans le panneau. Gallinita de la suerte1, Ñanduti 2, divers bricoles en palo santo3... Beau bric-à-brac de souvenirs paraguayens.

1 Gallinita de la suerte = petite poule de la chance : porte-bonheur en céramique en rond-de-bosse, dont les plumes stylisées sont noires maculées de petits points blancs, ou inversement.

2 Ñanduti = toile d'araignée, en Guarani : napperon polychrome aux entrelacs très complexes.

3 Palo Santo : bois très odoriférant, d’une teinte sombre tirant sur le vert. Outre des statuettes, on en fait également des matés – les puristes n’apprécient guère cette fantaisie, qui donne à la yerba un fort parfum de boisé.

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Une bonne chose de faite. Mais tout de même, nous restons sur notre envie de chipas... Pour tromper la faim, nous reprenons notre déambulation vers le fleuve.
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Nous débouchons sur la Plaza de Armas, où trône le flambant neuf “Monument à la Mère des Cités et Berceau de la Liberté en Amérique”, un lapacho métallique déchaîné, symbole du passé émérite d'Asunción.
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Un autre monument évoque un événement moins glorieux d'un passé plus récent : le “Mars Paraguayen” de 1999, au cours duquel furent tués sept jeunes manifestants dans des circonstances ahurissantes et révoltantes1.

1 Quelques précisions : les manifestants s'étaient rassemblés pour protester contre l'assassinat du Vice-Président de la République survenu le 23 mars ; tout porte à croire que le commanditaire présumé de ce magnicide était Luis Oviedo, leader d'un parti d'opposition et ancien collaborateur du dictateur Stroessner, avec l'aval du Président de la République en personne, Raúl Cubas ! Imaginez l'ampleur du scandale ! Plusieurs manifestations sont organisées sur la Plaza de Armas, se heurtant chaque fois à des contre-manifestations musclées, organisées par les partisans du pouvoir en place. Lors de l'affrontement du 26 mars, plusieurs tirs émanant des rangs pro-gouvernementaux abattent sept manifestants du cortège antagoniste ; parmi ces francs-tireurs, des fonctionnaires gouvernementaux sont clairement identifiés. Le scandale est immense ! Le Président de la République démissionne dès le 27 mars, et s'exile au Brésil.

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Autour de l'antique place centrale de la ville s'organisent logiquement les principales institutions nationales, encore que cet hôtel-de-ville érigé en 1857 ait été récemment déclassé en Centre Culturel de la République.
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Egalement reconstruite sous le règne de Don Carlos Antonio López, en 1845, la cathédrale métropolitaine arbore ces mêmes teintes rose-bonbon qui faisaient fureur en leur temps.
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En contrebas de la place s'agglutine un bidonville, réalité omniprésente au Paraguay où un tiers de la population vit en-dessous du seuil de pauvreté, sempiternelles victimes du latifundisme1.

1 77% des terres agricoles sont détenues par 1% de la population : le latifundisme, générateur d'inégalités sociales et – par-dessus le marché – de gâchis économique, est un mal récurrent en Amérique Latine.

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A proximité, les toits de tôle ondulée assiègent le flamboyant Palacio de los López, comme pour mieux surveiller le nouveau locataire du palais présidentiel : Lugo1, qui a promis la réforme agraire intégrale.

1 Fernando Lugo, ancien évêque de son état, pur produit du gauchisme latino-américain {façon Morales plutôt que Chavez, toutefois}, a été élu Président de la République le 20 avril 2008 avec 40,8% des voix ; sans majorité, et à la tête d'une fragile coalition, il aura fort à faire pour mener à bien son ambitieux programme réformiste. A l’heure où nous écrivons ces lignes, plusieurs scandales ont d’ailleurs entaché sa réputation d’homme intègre : une demi-douzaine de femmes lui ont déjà crédité la paternité de leur enfant…

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Ne nous perdons pas dans des pronostics pessimistes sur les chances de réussite de “l'Évêque des Pauvres”, et contentons-nous d'un bref laïus sur l'histoire chahutée de cette bâtisse.
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L'éclectisme tous azimuts de sa pompeuse façade reflète le goût sûr de son commanditaire, le Maréchal López1, admirateur de Napoléon III dont il sut imiter tant le mauvais goût stylistique que la gloire militaire.

1 Voir note, photo 28.

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Mis en chantier dès 1857, le palais fut tout juste achevé à temps pour être bombardé puis saccagé par les troupes brésiliennes vainqueurs de l'infortuné Maréchal López, lors de la Guerre de la Triple Alliance, en 18691.

1 Reconstruit en 1892, et reconverti en Palais du Gouvernement, il dut cependant faire le deuil de son précieux mobilier européen, razzié par les Brésiliens

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Est-ce pour oublier cette pathétique page de son histoire qu'un gouvernement postérieur fit arrimer la Canonnière Humaitá sous ses fenêtres, en souvenir de la victorieuse Guerre du Chaco ?
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Ne rions pas ! Le Río Paraguay se prête bel et bien aux manœuvres de la {modeste} flotte nationale, qui, à défaut d'avoir jamais pu bombarder Buenos Aires, tint un rôle majeur1 durant la Guerre du Chaco.

1 Un rôle logistique essentiellement, pour transporter les troupes jusqu'à Puerto Casado, au Nord, épicentre de l'offensive paraguayenne. Les canonnières Humaitá et Paraguay avaient également vocation à assurer la défense aérienne. La Humaitá, ancrée au pied du Palacio de los López, a été reconvertie en Musée d'Histoire Navale.

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Nous retraitons jusqu'à la Place de la Démocratie, dont l'angle nord-ouest est monopolisé par une autre lubie du Maréchal López, librement inspirée de la chapelle parisienne des Invalides – ah, Napoléon, quand tu nous tiens !
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Indéniablement, nous ne pouvons que le féliciter d'avoir boudé le badigeon rose cher à son père : ce ronflant Panthéon des Héros, immaculé, y gagne en solennité, et peut-être même en distinction !
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Pauvre vieux Maréchal... Lui qui, précisément, n'en a même pas vu la couleur, puisqu'il fut exécuté par les troupes brésiliennes victorieuses, en 1870, laissant en plan la construction du mausolée – et son pays en lambeaux.
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A l'intérieur, Notre-Dame de l'Ascension accueille le visiteur ; patronne du Paraguay et Maréchale de ses armées, la Vierge était la dédicataire initiale de cet Oratoire, dans l'esprit de López – il en fut vachement remercié !
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Toujours à l'imitation des Invalides, une fosse circulaire expose les sarcophages des grands hommes de la patrie : Estigarribia1, Ayala 2, Caballero3 et d'autres entourent respectueusement l'imposant cercueil du Soldat Inconnu.

1 Le Maréchal Estigarribia est le vainqueur de la Guerre du Chaco.

2 Eusebio Ayala est connu comme le “Président de la Victoire”, puisque celle-ci fut obtenue sous son mandat.

3 Bernardino Caballero, Président de la République également, fut, à la fin du XIXème siècle, le fondateur du très conservateur Parti Colorado, qui a régné sur le Paraguay sans interruption ces 50 dernières années, avant de céder la place à Lugo.

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Quant au Maréchal López, on lui fit une place sous le transept. Héros controversé, l'abondance d'ex-voto qui l'entourent est un hommage international à ce pourfendeur malheureux de l'impérialisme étranger.
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Au-dessus de lui, son grand-oncle le Doctor Francia, fondateur de la dynastie López et artisan de l'émancipation paraguayenne, fronce un sourcil colérique, constatant l'échec irrémédiable de son idéal autarcique.
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Quittant le tombeau de López fils, un taxi nous emmène dans les faubourgs d'Asunción jusqu'au sépulcre primitif de López père – à chacun son petit caprice1.

1 Les restes de Carlos Antonio López ont toutefois rejoint ceux de son fiston le Maréchal, transférés au Panthéon des Héros en 1936.

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L'église de la Trinité, commanditée par Carlos Antonio López et achevée en 1864, révèle des préoccupations architecturales moins xénomaniaques que le Panthéon : certes, volutes et pinacles sacrifient aux sirènes de l'italianisme ;
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mais la forme générale du temple, dépourvu de transept et de clocher1, coiffé d'une rustique charpente dont les poutres affleurent au-dessus d'une galerie extérieure latérale,...

1 Le campanile italianisant, visible sur la première photo, a été rajouté postérieurement.

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...ainsi qu'au plafond des nefs collatérales, à l'intérieur – tous ces éléments, donc, ressortissent à un caractère bel et bien national, inspiré ouvertement d'un haut-lieu architectural du Paraguay : l'église de Yaguarón.
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Et si l'architecte n'a pu s'empêcher de couronner la nef centrale d'une voûte au vocabulaire pictural assez classique, sa structure en bois permet de conserver un indéniable cachet paraguayen.
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Quant aux retables latéraux, si l'on fait abstraction des baroques colonnes salomoniques, ils ont été importés tout droit de Yaguarón. Bref, vous l'aurez compris : nous ferions bien d'y aller, à Yaguarón !
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« Chauffeur, suivez ce bus ! ». Après avoir rongé notre frein le temps d'une nuit bien tranquille à Asunción, nous nous propulsons de bon matin jusqu'à Yaguarón.
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A une petite cinquantaine de kilomètres à l'est de la capitale, Yaguarón offre la physionomie subtropicale de la Région Orientale : les jaunes poussiéreux de l'occidental Chaco cèdent la place aux terreaux ferrugineux.
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Il règne dans ce gros bourg rural une atmosphère un rien désuète, très hors-du-temps ; un petit miracle de bien-être dont nous aimerions jouir plus longuement.
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Mais les impératifs du tourisme nous arrache à notre torpeur : vautrée dans un carré de verdure, la plantureuse église franciscaine San Buenaventura de Yaguarón requiert toute notre attention.
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Fanfreluches italianisantes de la façade en moins, le tribut que lui doit l'église de la Trinidad d'Asunción est manifeste, avec sa charpente sobrement recouverte de tuiles et sa galerie latérale – la gargouille n'est pas d'époque.
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A l'intérieur, force est d'admettre que le modèle surpasse incontestablement le pastiche : comme naissant du plafond, un déluge de lianes bigarrées phagocyte les poutres –
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puis elles s'enroulent autour des colonnes ivoirées, étranglant à petit feu le lapacho d'une seule pièce dont celle-ci sont faites.
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Leur cime s'épanouit en une canopée de pannes et chevrons chamarrés, piquée d'une myriade de grosses orchidées, et l'on s'étonnerait presque de ce qu'aucun toucan ne se balance aux solives !
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A force d'errer le nez en l'air, dans ce dédale de points de fuite qui donne le tournis, on manquerait de peu d'emplafonner le premier lampadaire venu – fort heureusement, la nef en est dépourvue.
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Nous rapatrions notre regard à hauteur d'homme, et avisons ce sympathique saltimbanque visiblement anxieux de maintenir en équilibre sur sa tête la monumentale chaire en bois.
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Au sol, la luxuriance de la végétation n'est pas en reste, et nous nous débattons parmi ronces, branchages, fougères. Certaines fleurs bourgeonnent étrangement sur notre passage – méfiance...
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Nous avons raison de rester vigilants : cette grosse corolle bariolée dont un papillon innocent serait tenté de butiner le pistil entrouvert, est en fait une redoutable plante carnivore, prompte à vous liposuccer la cervelle.
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Dans ce maquis semé d'embûches, il ne faut jamais relâcher l'attention – malgré son camouflage digne d'un treillis, nous démasquons cette porte patibulaire qui eut pu {quel effroi !} nous happer tout cru vers la sacristie.
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Ayant réchappé de la jungle sans merci, nous grimpons sur le Cerro Yaguarón, un massif granitique qui est pris d'assaut une fois l'an, lors de la semaine sainte, par des hordes de pèlerins traquant la sandale de Saint Thomas !
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Certes, l'incrédulité serait de mise, et pourtant la légende veut que l'apôtre ait effectué un voyage aux “Indes”, au cours duquel il aurait imprimé ici l'empreinte de sa calceus dans le granite. Mais faute de guide, la relique nous échappe1.

1 Saint Thomas est connu comme l'Apôtre des Indes, et certains exégètes ont voulu comprendre qu'il s'agissait non seulement des Indes Orientales {l'Inde} mais aussi des mal nommées Indes Occidentales, à savoir l'Amérique. Dès le XVIIèmes siècle, dans une volonté un peu naïve d'intégrer les mythes précolombiens à la mythologie chrétienne, certains théologiens mexicains assimilèrent le dieu aztèque Quetzalcóatl à Saint Thomas, et partant Hernán Cortés à la réincarnation du saint. Au Paraguay, et dans le sud du Brésil, il se produisit un même syncrétisme religieux, confondant cette fois-ci l'apôtre avec Pa'i Sumé, héros légendaire ayant introduit l'agriculture chez les Guaranis.. L'empreinte, elle, existe bel et bien, nous en avons vu des photos. Quant à savoir si elle est authentique... Cela n'empêche pas les jeunes gens des alentours de venir mesurer leurs pieds à l'aune de la sainte empreinte : si leur pointure est identique, ils sont assurés d'épouser la fille de leur cœur dans l'année !

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Nous poursuivons notre circuit hagiotouristique, cette fois-ci sur les traces de Saint Roch, victime d'un curieux dédoublement de personnalité du fait d'un homonyme récemment canonisé par Jean-Paul II ;
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au milieu de la foule canine se référant au saint montpelliérain du XIVème siècle, protecteur des chiens, se sont glissées quelques icônes représentant San Roque González, premier saint et martyr criollo.
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A peine remis de cette découverte ébaubissante, nous pilons brusquement à hauteur d'une curieuse chapelle encombrée de joujoux, qui tient boutique dans le bas-côté de la nationale 1.
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Nulle brocante : ce pandémonium de poupards et de peluches, dont certains encore dans leur emballage d'origine, témoigne de l'engouement récent pour une autre recrue jean-paul-deuxième du martyrologe : Sainte Marie Eugénie.
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Créditée de la rémission d'une petite Philippine handicapée en 1996, cette mère-sup' du XIXème siècle est devenue l'égérie des futures mamans, qui sacrifient sur son autel des troupeaux d'innocents toons.
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A quelques kilomètres de là, nous faisons étape à Paraguarí, “berceau de l'indépendance nationale”, doté d'une église naturellement consacrée à Saint Thomas ; un mauvais contre-jour nous dissuade d'en photographier la très belle façade.
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Dans les allées du parc attenant, ce monolithe réveille en nous de troublantes réminiscences hexagonales – une même génération de conscrits fauchés dans les tranchées de la Somme ou du Chaco.
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Pour ajouter à l'amertume, nous tétons songeusement quelques lampées de maté, exhortés par La Selecta à ne pas quitter le Paraguay sans une ultime libation d'ilex paraguariensis!
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Obnubilés par l'arrière-train de cet autocar poussif, c'est in-extremis que nous avisons le moyen de combler l'envie de chipas sur laquelle nous étions restés depuis notre dégustation manquée de la veille : là ! une chipería !!
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Farines de maïs et de manioc, fromage, lardons : ce petit pain, symbole du syncrétisme hispano-guarani1, rejoint la soupe paraguayenne2 au panthéon des étouffe-chrétiens. C'est le moindre des maux de la faim.

1 Lorsque les conquistadors débarquèrent au Paraguay, ils furent surpris de constater que les Guaranis confectionnaient un véritable pain, élément essentiel de leur pitance quotidienne ; or, le pain était aux yeux des envahisseurs un attribut évident du Christianisme. Quel émoi ! Bientôt, les Espagnols apportèrent leur grain de sel à la recette guaranie, et ajoutèrent à la galette originale de maïs et de manioc, tout de même un peu tristounette, quelques ingrédients bien de chez eux : lardons, œuf, fromage. Notre “chipa” contemporaine est la délicieuse héritière de ce rare exemple de syncrétisme évangélico-gastronomique aux Amériques.

2 Contrairement à ce que son nom pourrait laisser penser, la “soupe paraguayenne” n’est absolument pas liquide et ressemble carrément à une grosse galette. Il s'agirait en fait d'un avatar de la fameuse Tarte Tatin, ou comment récupérer un plat raté. Une anecdote raconte en effet comment la cuisinière de Carlos Antonio López {que je ne présente plus} était habituée à préparer à son maître le “tykuetï” dont il raffolait, une soupe blanche à base de lait, de farine de maïs, d'œuf et de fromage {avec tous ces ingrédients, on se demande comment cela pouvait déjà bien ressembler à une soupe}. Un beau jour, évidemment, il fallut que la pauvrette rate son affaire : ayant eu la main un peu lourde sur la farine, elle obtint une espèce de purée spongieuse fort rebutante. Désemparée, affolée, mais inspirée, ne pouvant raisonnablement pas, à l'instar des sœurs Tatin, badigeonner sa tambouille de caramel, elle résolut de la passer au four, espérant sans doute un miracle – miracle qui fut sans doute que Don Carlos, autocrate caractériel, ne s'étranglât pas en déglutissant cette soupe d'un nouveau genre, mais que, bien au contraire, pris d'une subite illumination patriotico-marketing, il consacrât cette galette hautement calorique sous la glorieuse appellation de “soupe paraguayenne”, destinée à devenir l’un des mets les plus traditionnels du Paraguay. Tout fut mal qui finit bien.

Le périple « Contes et déconvenues du Chaco (et d'ailleurs) » n'est pas terminé ; poursuivez l'aventure !

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